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Devastated

J'entendais des éclats de voix et de la porcelaine se briser en de minuscules particules sur le sol en bois du salon. Encore. Je percevais de lourds pas monter les marches, elles aussi en bois, menant à ma chambre. Comme tous les jours. J'appréhendais le bruit de la poignée de porte, ce dernier ne signifiant que de très mauvaises choses. Une nouvelle fois. Je fermais les yeux attendant que la douleur cinglante cesse et que les reproches tarissent. Comme à mon habitude. Et je m'endormais l'esprit torturé, du rouge teintant ma peau et des larmes mouillant mes joues et mes draps. Comme chaque nuit. TW : cette histoire traitera de sujets sensibles tels que des abus physiques. Si vous êtes sensibles ou que vous avez vécu certains traumatismes, je vous déconseille de lire ce qui va suivre. Sur ce, bonne lecture !

Mlnuff · Teen
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8 Chs

Chapitre 4

En rentrant dans la maison je sentais que quelque chose n'allait pas. En effet lorsque je passais le pas de la porte je vis une ombre dans le salon. Mon sang se glaça et mes sens se déployèrent en alerte. Il était là, assis sur le canapé en cuir noir du séjour. Il se tenait droit, semblant attendre quelque chose ou quelqu'un. Quand le parquet émis un grincement presque imperceptible il pivota la tête dans ma direction.

Je percevais dans l'air une odeur forte de whisky, reconnaissable entre mille. Sans aucun doute il avait passé la journée à noyer ses émotions dans l'alcool. Je compris alors qu'il ne partirait pas, du moins pas ce soir. Sa voix s'éleva m'annonçant qu'il m'attendait, son ton étant trainant et sa façon de parler confuse. Par la suite il fit craquer une à une ses articulations.

Je ne pouvais pas bouger, pétrifiée sur place dans l'attente et l'angoisse. Je ne savais absolument pas ce qui allait se passer. Il se leva péniblement et me dit le plus sérieusement du monde qu'il ressentait l'envie de changer, de se retrouver un métier et de se reconstruire. Intérieurement je rigolais ironiquement en levant les yeux au ciel. Il avait sûrement bu pour fêter son renouveau... Évidemment.

Je décidais malgré tout de le croire, du moins j'essayais. Pour la première fois depuis quelques années il démontrait un avancement. Je souriais alors faussement, l'encourageant du mieux que je le pouvais. Je ne parvenais pas à être contente pour lui, il avait pour toujours cassé quelque chose en moi, quelque chose qui ne se réparait pas... Je tournais ensuite les talons et partie en direction de ma chambre.

Je m'assis sur mon lit, les yeux dans le vide, pensante. Depuis son départ il n'avait jamais montré de signe d'avancement, d'évolution. Malgré les doutes qui subsistaient je ne parvenais pas à m'empêcher d'espérer... Espérer une vie meilleure, peut-être plus joyeuse. Du moins une vie normale. Et même éventuellement pouvoir me réveiller avec le sourire, la peau aussi blanche qu'elle devait être et sans avoir besoin de me camoufler à tout va sous une couche de maquillage. Oui, je ne pouvais m'empêcher d'y penser.

Pour la première fois depuis longtemps je m'autorisais un moment d'égarement total. Je me mis debout et me dirigeais vers mon armoire. Je récupérais alors une boîte à chaussure noir assez usée, comme pouvaient en témoigner les différentes stries sur la peinture, et l'ouvrit tout en m'asseyant à même le sol. Devant moi se dressaient de multiples souvenirs de ma vie antérieure. Des vestiges de ce que j'avais pu être.

Je me saisissais d'une photo et la regardais intensément. Ce que je voyais me paraissait actuellement faux. Comme un vulgaire mensonge. Trois personnes dans un jardin, deux adultes et une petite fille.

La femme, sur la gauche souriait à pleines dents faisant ressortir de minuscules fossettes. Des yeux verts pétillants  regardaient fixement l'objectif de l'appareil photo, ses longs cheveux blonds se balançant avec douceur dans la légère brise qui les entourait. Elle tenait la main à un homme à sa droite. Lui aussi semblait heureux au possible, des yeux bruns souriants également et sa fine chevelure poivre et sel. Sur son dos se balançait une petite blonde, l'air coquin et paisible. Nous pouvions aisément remarquer cette innocence qui la caractérisait si bien. Du moins à cette époque-là.

Lorsque la femme, sa mère, avait du jour au lendemain quitté le foyer durant la nuit, elle avait emporté une part du coeur et de l'innocence de la jeune fille. Et ce quelques mois à peine après la prise de ce cliché. Elle était partie avec un autre homme. Chose qu'elle a rapidement appris par le flot continue de parole de son père qui avait trop ingurgité d'alcool.

Elle se demandait constamment ce qui l'avait poussé à partir. Tout allait pourtant si bien à ses yeux. Mais tout ça n'était qu'un mensonge, une façon de camoufler la triste vérité. Et c'est avec une larme, une seule larme, que la jeune fille devenue adolescente rangea la boîte. Par sa faute la jeune fille avait grandis trop vite, j'étais devenue quelqu'un d'autre.