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Chapitre 6 : Mercenaire

"Les nains sont les êtres les plus robustes face aux afflictions liées à la magie dans sa forme la plus brute, liquide. Ils sont à la fois ceux qui la collectent et ceux qui la raffinent. Les nains sont également les seuls à posséder le savoir antique de l'infusion des runes."

Galäm, ayant fui le regard des gardes avec succès, se dirigea vers le port, motivé par le fait de retrouver son mentor. Il reprit le chemin parcouru la veille, encore fraîchement ancré dans sa mémoire, et, comme convenu, il fit le tour de la rive afin de baliser chaque taverne.

Quand il trouva enfin la bonne taverne, la taverne d'Yönum, il ne put s'empêcher de remarquer qu'elle était comme dissimulée, masquée par les bâtiments avoisinants. Ceux-ci étaient bien plus hauts que la petite bâtisse. L'estaminet en lui-même avait une apparence surprenante, celle d'une coque de bateau renversé, rompant par sa conception inhabituelle avec le style des bâtiments de grès blanc longeant le port. Galäm s'avança prudemment devant l'entrée, revêtu de sa cape comme d'un masque. Il ouvrit la porte avec fermeté, feignant une grande confiance en lui. À l'intérieur, l'ambiance était chaleureuse, bien que sombre. Le bois brun, éclairé par la lueur des bougies, mettait en valeur chaque table dans la pénombre. De même, le comptoir, au centre de la taverne, était illuminé par un puits de lumière provenant d'une sorte de chandelier monté à l'étage supérieur. Donovan l'attendait. Il était seul à une table, éclairé par la lueur justement de l'une de ses bougies. Il lisait tranquillement un journal local.

Comme celui-ci ne l'avait pas encore remarqué, Galäm en profita pour commander quelques boissons. Lorsqu'il rejoignit son ami, celui-ci ne fut pas surpris, même les yeux plongés dans son journal, il reconnut rapidement Galäm. Il le connaissait trop bien pour se laisser berner. C'est pourquoi, à son approche, Donovan sourit avant de dire spontanément :

"Ha, bien vous voilà, ne vous ai-je point trop manqué ? Trouver les bonnes personnes demande parfois du temps, aussi le cadre ici est charmant et on y mange bien, c'est pourquoi j'ai décidé de nous y rassembler."

Comme réponse, celui-ci rit : « Ho, je vois, vous étiez donc occupé à passer votre soirée à trouver un endroit où vous empiffrer allègrement pendant que je m'acharnais à décrypter la lettre de mon père.»

Il ne fallut pas plus longtemps au serveur pour amener les doux breuvages, et Donovan fut bien surpris cette fois, car les boissons sélectionnées par le prince montraient sa grande rigueur lors de la dernière leçon. En effet, il s'agissait d'une pinte de Knam, une célèbre bière que les pirates d'Isa avaient tendance à trinquer dans les régions du nord après l'abordage des navires marchands de Yomanra. Un précieux élixir dont le goût caractéristique provient de la fermentation non seulement de plantes poussant dans les terres du nord, mais aussi de certains poissons dont l'amertume qui en ressortait donnait un résultat aussi insolite qu'unique et, de surcroît, très fort en bouche. C'est bien là une boisson de pirates. Donovan en profita alors pour rajouter une anecdote à la liste. Il précisa que la taverne dans laquelle ils se trouvaient était sûrement, par le passé, un navire ayant subi un de ses abordages. Celui-ci datait d'une autre époque, dans laquelle Yomanra n'était non pas une cité d'Enamareke, mais bien d'Isa, terre du nord. C'est en fait la ville de Merekia qui a assiégé et conquis Yomanra, et ce, afin de résoudre, pour les côtes d'Enamareke, les problèmes de piraterie. Ensuite, Donovan dit :

« Ce soir, nous dormirons ici. Afin de ne pas éveiller les soupçons. Nos amis nous rejoindront dans la matinée. Chacun d'eux a des origines bien différentes, de quoi satisfaire notre curiosité tout au long du voyage. »

Le prince acquiesça. Il leur fallait aussi trouver un prétexte leur permettant de s'éclipser auprès de l'ambassade quelques jours sans pour autant trop éveiller les soupçons. À cette fin, Galäm pourrait simplement prétexter se former auprès des mages à divers arts occultes. Il savait qu'alors même l'ambassade n'oserait poser trop de questions par crainte de froisser les hauts membres du conseil de l'académie.

C'est alors, après avoir savouré leur dernière bière avant le départ, non sans une aigre grimace à chaque gorgée, qu'ils remercièrent le tavernier afin de se préparer à partir. L'homme ne put s'empêcher de les observer d'un air inquisiteur. En effet, il semblait plutôt habitué à une clientèle fidélisée de longue date.